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Voline et la presse anarchiste

mercredi 18 septembre 2024, par René Bianco (CC by-nc-sa)

On ignore trop souvent que Voline fut un prodigieux animateur de journaux et de revues anarchistes. Aussi bien en Amérique du Nord qu’en Russie ou en Ukraine, en Allemagne comme en France, il participa à de nombreuses publications. Et la seule fois où il ne respecta pas ses engagements, ce fut le 18 septembre 1945 lorsqu’il meurt sans avoir corrigé le dernier numéro des Petits Cahiers.

De longues années durant, le nom de Voline fut étroitement associé à un fort volume à couverture noire, ornée d’un bois gravé de Jean Lébédeff, au titre fort suggestif [1], et qui servit à la formation de générations de militants tant la « littérature » anarchiste était alors rare sur le marché.

Ceux qui avaient la possibilité de fréquenter les quelques « vieux » militants qui avaient connu la période de l’avant-guerre pouvaient, avec un peu de chance, se faire prêter d’autres textes de Voline comme par exemple la préface qu’il rédigea pour l’édition française de L’Histoire du mouvement makhnoviste de P. Archinov (éd. de la Librairie internationale, Paris, 1924, 419 pp.) ou encore son importante contribution (120 pages sur 240) à l’ouvrage collectif (S. Faure, L. Barbedette, Victor Méric et Voline) intitulé La Véritable Révolution sociale, paru en 1934 aux éditions de L’Encyclopédie anarchiste. Les plus affamés de lecture pouvaient enfin se repaître de deux petits fascicules : Le Fascisme rouge (16 pp.), publié à Bruxelles en 1934 par les éditions Pensée et action, animées par Hem Day ; La Révolution en marche (32 pp.), paru en septembre 1938 aux éditions Vie et pensée, fondées à Nîmes par A. Prudhommaux [2].

Mais, aujourd’hui encore, ces textes ne se trouvent pas facilement et pour beaucoup le nom de Voline demeure presque exclusivement rattaché à son livre La Révolution inconnue (qui a fait l’objet de plusieurs rééditions ces dernières années), de sorte que se trouvent toujours un peu occultés sa vie, sa pensée, son action et, en premier lieu, ses activités de militant.

Or, il suffit de se pencher quelque peu sur son « itinéraire » pour se rendre compte assez rapidement que Voline fut, tout au long de sa courte vie (il est mort à l’âge de 63 ans), un prodigieux animateur. En plus du travail — souvent si mal rémunéré — et de ses nombreux travaux de traduction [3] il donna, en tous lieux, quantité de conférences et surtout consacra une part non négligeable de son temps (et donc de sa vie) à la réalisation de journaux et revues anarchistes aussi bien en Amérique du Nord qu’en Russie et en Ukraine au cours de la révolution, exception faite bien entendu des moments où il croupissait dans une cellule du fait même de ses activités de propagandiste. C’est donc encore et tout naturellement à l’activité éditoriale qu’il va se consacrer pendant les années d’exil en Allemagne. On le charge en effet, en 1922, d’une publication (en russe) qui prendra la forme d’une belle revue mensuelle de 80 à 90 pages à laquelle collaborèrent les meilleures plumes du mouvement anarchiste international, un peu dans le style de la célèbre revue italienne Pensiero e Volontà. On peut même dire que cette publication, Rabotchee Anarkhist (l’Ouvrier anarchiste), fut l’une des plus belles et des meilleures de l’entre-deux-guerres pour ce qui concerne la presse anarchiste bien entendu. Ce résultat lui est dû car il s’y consacra entièrement. En effet, non seulement il écrivait des articles et traduisait les autres contributions reçues, mais il s’occupait aussi de la maquette, de la mise en page, de la correction des épreuves et, bien sûr, de l’administration. Il cherchait sans cesse à en améliorer le fond et la forme, et son souci de la perfection était si profond que, selon le témoignage de Fedeli, il arriva plus d’une fois à Voline de se réveiller la nuit pour corriger un mot qui ne le satisfaisait pas complètement !

Ugo Fedeli

Cet exemple nous montre comment Voline concevait le travail à faire et l’intérêt qu’il portait à l’écrit, encore qu’obligé de « gagner sa vie » il ne pût jamais consacrer à l’écriture que les rares loisirs qui lui restaient — chacun sait combien la vie militante est prenante — et, bien sûr, une partie de ses nuits. C’est donc pour combler un certain vide que nous allons rapidement tenter de faire connaître un Voline un peu différent de l’image que s’en font, plus ou moins inconsciemment, les lecteurs de son livre. Il s’agit en effet d’un homme qui fut toujours très impliqué dans le combat quotidien et qui néanmoins demeure l’auteur d’un nombre assez considérable d’articles. Nous n’en ferons pas, ici, le recensement et nous limiterons notre propos à sa collaboration aux titres de la presse anarchiste d’expression française, en espérant qu’un jour, prochain peut-être, il se trouvera quelqu’un pour dresser un état (en toutes langues) de ses écrits.

Participation à « L’Encyclopédie anarchiste »

Sauf erreur ou omission, il semble que la première mention de son nom dans un périodique de langue française apparaisse dans l’Avenir international, dont le sous-titre : Revue mensuelle d’action sociale, littéraire, artistique, scientifique indique assez son éclectisme [4]. En effet, autour d’un noyau constitué par une dizaine d’anciens collaborateurs des Temps nouveaux dont J. Mesnil, Ch. Benoît, F. Stackelberg et André Girard qui est le responsable de la rédaction, on trouve les signatures d’Amédée Dunois, Alzir Hella, Han Ryner, A. Croix, E. Masson, Luigi Fabbri... mais aussi P. Monatte, G. Dumoulin, Boris Souvarine, Henri Guilbeaux, R. Péricat, G. Monmousseau, Marcel Martinet... La revue est évidemment très favorable à la Révolution russe qui exerce un fantastique attrait sur certains de ses rédacteurs — ceux-là même qui seront à l’origine du tout premier Parti communiste (SFIC), mais c’est tout de même Eichenbaum (le pseudonyme de Voline n’apparaît pas encore) qui en est le correspondant pour la Russie.

Pierre Monatte

Par la suite, c’est-à-dire au cours des années 1923-1925, on trouve son nom de plume dans la Revue anarchiste [5] où il publie en particulier une série d’articles sur la Russie, sous la forme de lettres intitulées « Choses vécues » [6], et dans la Revue internationale anarchiste, revue mensuelle polyglotte puisque publiée en français, italien et espagnol [7]. En même temps, il collabore au Libertaire alors quotidien [8] et c’est dans cette série notamment qu’il prendra vivement la défense de N. Makhno, accusé d’avoir été un agent de la Pologne et surtout d’avoir organisé des pogromes. Il écrit à ce propos [9] : Mes camarades et moi, ayant plus ou moins participé au mouvement makhnoviste, savons et déclarons catégoriquement que Makhno n’a jamais organisé de pogromes antisémites.

Au cours de la décennie suivante (1925-1935), Voline poursuit bien entendu sa collaboration au Libertaire, redevenu hebdomadaire. C’est l’époque du fameux débat sur la plate-forme qui va engendrer non seulement d’interminables discussions dans le mouvement anarchiste international, mais qui est surtout à l’origine de dissensions graves parmi les anarchistes russes en exil. Dans ce milieu, en effet, le débat devient très rapidement d’une âcreté assez vive et la passion entraîne plusieurs des intervenants à dépasser de loin le débat d’idées. Les colonnes du journal en portent témoignage et constituent aujourd’hui un apport précieux à qui veut s’informer réellement sur ce point [10].

Après cette polémique un peu amère [11], Voline consacra une bonne partie de son temps à des traductions pour L’Encyclopédie anarchiste [12] et il rédigea lui-même plusieurs articles très importants dont voici une liste que j’espère exhaustive : « Antiétatisme », « Antisémitisme », « Autorité », « Biologie », « Classes », « Création », « Déterminisme », « État », « Faculté », « Faim », « Libre arbitre », « Masses (psychologie des) », « Matérialisme », « Nihilisme », « Pogrome », « Progrès », « Révolution russe », « Soviets », « Synthèse anarchiste ». Parallèlement, il donna quelques articles à la Revue anarchiste publiée par F. Fortin [13], au Libertaire, au Combat syndicaliste [14], à l’En Dehors et faisait d’assez nombreuses traductions — notamment de l’allemand au français — pour le Service de presse de l’AIT [15]. Il continuait également à envoyer des textes aux autres organes anarchistes comme Dielo Trouda ou même Freie Arbeiter Stimme  [16], tout en collaborant, occasionnellement, à la Gazette de Belgique  [17] ou à des périodiques créés pour la circonstance, comme par exemple le numéro de Ce qu’il faut dire que Hem Day fit paraître à Bruxelles en juillet 1934, Pour la défense des révolutionnaires persécutés en URSS. Pour le droit d’asile et contre la Guépéou [18]. On peut aussi trouver parfois sa signature dans d’autres organes parus au cours de cette même période, mais il ne s’agit pas forcément d’une véritable collaboration. Ainsi, la revue Plus loin, publiée alors par les anciens camarades de Jean Grave qui, comme lui, avaient approuvé le trop fameux « Manifeste des Seize », donne-t-elle un extrait de l’un de ses textes sur la « Révolution » dans les numéros 110 et 114 de juin et octobre 1934. Cela prouve seulement que l’intérêt des réflexions de Voline n’avait pas échappé à un esprit aussi vif que celui du docteur Marc Pierrot.

De « Terre libre » à l’Occupation

L’année 1936 marque évidemment un tournant dans les activités de Voline. Inutile de chercher son nom dans le Libertaire des années suivantes car il va, avec d’autres, participer à la vie d’une nouvelle organisation : la FAF (Fédération anarchiste de langue française). Il consacre alors une part très importante de son temps à l’édition de Terre libre [19] et, simultanément, milite activement au sein du comité anarchiste et syndicaliste d’aide à l’Espagne. A ce titre, il est chargé de s’occuper en 1936-1937 du journal bi-hebdomadaire l’Espagne antifasciste(CNT-FAI-AIT) [20].

André Prudhommeaux

La tâche n’était pas facile et André Prudhommeaux rapporte à ce propos qu’il soutenait — avec une vigueur calme et une précision qui ne se démentirent jamais — la thèse de la révolution en permanence et des méthodes insurrectionnelles, contre les tentations ministérialistes et militaristes qui sévissaient en Espagne et qui déroutaient de nombreux camarades.

En 1938, Voline vient s’installer à Nîmes pour plusieurs mois. Il poursuit comme il le peut la rédaction d’un ouvrage de réflexion sur la révolution mondiale dont il considère que la phase destructrice, qui a commencé depuis 1914, se poursuit sous les yeux des contemporains de manière impitoyable et s’efforce de décrire les « conditions essentielles » de la grande émancipation qu’elle peut engendrer. Il continue également de s’occuper très activement de l’organe de la FAF, qui paraîtra bientôt en alternance avec l’Espagne nouvelle  [21]. Les articles qu’il publie alors — et qui mériteraient d’être rassemblés — sont souvent d’une rare clairvoyance. Mais les événements se précipitent et c’est bientôt la chute finale pour l’Espagne libertaire. Cette catastrophe terrible pour l’anarchisme s’ajoute à celles que Voline a déjà connues, mais il reste sur la brèche malgré tous ses soucis [22] et les perspectives catastrophiques qu’il entrevoit. Il continue, en particulier, à collaborer de temps à autre à la Voix libertaire [23] et ne répugne pas à l’occasion de donner sa prose à de modestes publications, comme par exemple le Bulletin intérieur du Comité de Marseille de la jeunesse libertaire [24].

André Arru

Mais Voline se voit bientôt contraint de trouver refuge en zone dite « libre », à Marseille très précisément. Il survit comme il peut de petits travaux pénibles, donnant quelques leçons ici et là, se prive beaucoup, de tout, mais demeure toujours confiant, toujours optimiste, sans se plaindre de sa situation personnelle et ayant toujours grand soin de ne laisser soupçonner à personne son extrême détresse physique. [25] Tout cela ne l’empêchera pas de se joindre immédiatement au groupe anarchiste clandestin de Marseille dès que son principal animateur, André Arru, l’eut contacté au début de février 1941. Outre des tracts, des affiches et même une brochure, le groupe éditera aussi un journal anarchiste clandestin imprimé, le seul qui ait été publié en France par des anarchistes en pleine occupation allemande, et dont Arru et Voline furent les rédacteurs [26].

La Libération (!) cependant n’améliorera guère la situation de Voline. Miné par les privations et le surmenage, il tombe gravement malade au moment même où il consacre toute son énergie à la réorganisation du mouvement et qu’il vient, à cet effet, de publier le premier numéro des Petits Cahiers  [27] sous l’égide de la Fédération libertaire, Région du sud. Littéralement exténué, il s’effondre brutalement en mars 1945 et va être hospitalisé pendant quarante-cinq jours ; ce qui ne l’empêche pas de préparer le deuxième numéro dont il corrigera les épreuves, le jour même de sa sortie de l’hôpital, le 25 mai au soir ! Et le lendemain, il était à l’imprimerie...

Léo Voline

On connaît la suite : son repos forcé à La Treille, dans la banlieue de Marseille, chez Francisco et Paquita Botey, un couple d’anarchistes espagnols qui vont le choyer pendant trois mois ; son impatience aussi de se voir éloigné de toute activité militante. Il se laisse enfin convaincre de retourner à Paris. En août, son fils Léo vient le chercher à La Treille et le ramène à Paris, via Valence [28]. Mais il est trop tard et son organisme épuisé ne peut plus lutter contre une phtisie si avancée. Il meurt un mois après, le 18 septembre, sans avoir pu procéder une dernière fois à la correction des épreuves du dernier numéro de la dernière publication dont il avait accepté la charge. Ce fut bien la seule fois sans doute où Voline ne respecta pas ses engagements !

La disparition d’un militant d’une telle valeur, au parcours un peu exceptionnel, fit évidemment l’objet de plusieurs articles dans la presse anarchiste d’expression française [29]. Cependant on a quelque peine, au cours des années suivantes, à trouver trace du souvenir du disparu. Ce n’est semble-t-il qu’en 1964 qu’on a enfin l’occasion de retrouver son nom ! Cette année-là, en effet, Gaston Leval publie dans le n° 96/97 de ses Cahiers de l’humanisme libertaire la traduction d’un article de Voline paru en 1917, dans un journal russe (Golos Trouda). Puis, en juillet 1968, l’excellente revue Noir et rouge rassemble dans un de ses suppléments de 54 pages l’essentiel des textes relatifs au débat sur la plate-forme. Les idées anarchistes connaissent alors un certain renouveau et de courtes biographies de Voline ou des citations de ses œuvres se retrouvent alors jusque dans de très petits bulletins, comme par exemple Approche de l’anarchie, publié à Nice par l’ORA en 1969, ou encore Lycée critique, ronéoté la même année à Agen par de jeunes élèves. La réédition de La Révolution inconnue entraînera, à son tour, quelques autres articles dont il n’est peut-être pas utile de dresser ici la liste [30], d’autant que la place nous est mesurée ! Disons donc pour conclure que Voline pourrait servir d’exemple, au même titre que les Grave, Faure, Pouget, etc., de ce type particulier d’anarchiste qui a une conscience aiguë de l’importance de l’écrit pour la diffusion des idées qui lui sont chères et qui s’impose, à lui-même, les plus lourdes contraintes dans son combat quotidien, pour une société plus juste, plus fraternelle, plus... libre !

Tout cela, Voline le fit, incontestablement, et il l’a toujours fait avec un courage tranquille, un optimisme que rien ne pouvait ébranler, comme l’écrivait un de ses amis, sans jamais en tirer une quelconque gloire, avec simplicité ; ce qui, quand même, méritait d’être rappelé ici.


[1Il s’agit bien entendu de l’édition posthume de La Révolution inconnue par les Amis de Voline, Paris, 1947, 696 pp.

[2Ce fascicule porte le n° 1 d’une série qui devait être mensuelle mais, à notre connaissance, la publication s’est arrêtée à ce premier numéro.

[3Voline connaissait parfaitement l’allemand et le français. Il apprit ensuite l’anglais et plus tard, l’espagnol et l’italien. Sa première grande traduction en langue française est sans doute la forte brochure de 128 pages intituléeRépression de l’anarchisme en Russie soviétique, paru à Paris en 1923, aux éd. de la Librairie sociale, avec une préface d’André Colomer.

[4N° 1, nivôse 126 (janvier 1918) - n° 32, août-octobre 1920. Collection complète à l’Institut international d’histoire sociale d’Amsterdam sous la forme de deux volumes reliés (cote ZO 10519).

[5Revue mensuelle de 48 à 72 pp. (sauf le dernier numéro qui ne compte que 24 pp.), n° 1, janvier 1922 - n° 35, a. IV, 10 août 1935. Elle eut successivement comme rédacteur principal : Sébastien Faure, André Colomer et Georges Bastien.

[6La première lettre paraît dans le n°5, mai 1922. La neuvième dans le n°20, septembre 1923. Il publie en outre deux articles sur « La synthèse » dans les n° 25 et 27, respectivement de mars et mai 1924.

[7Cette revue ne dura que quelques mois (n° 1, 15 novembre 1924 - n° 8, 15 juin 1925). Elle fusionna en effet, en juin 1925, avec la Revue anarchiste (cf. note 5 ci-dessus).

[8Le Libertaire a été quotidien à partir du 4 décembre 1923 jusqu’au 26 mars 1925, soit pendant 479 numéros. Mes notes ne me permettent pas de préciser la date de son premier article ni la fréquence de sa collaboration.

[9Cf. son article « Arlandis, le valet au service de Moscou », in le Libertaire n° 172, 7 juin 1924. Sur cette même question on pourra aussi se reporter au Libertaire n° 73, 27 avril 1926, dans lequel Voline et Makhno répliquent aux accusations publiées par l’Humanité.

[10La place manque ici pour développer cette question qui déborde au reste largement le sujet. Rappelons simplement que j’ai été amené — notamment dans une lettre ouverte — à critiquer les interprétations tendancieuses ou totalement erronées d’Alexandre Skirda concernant le débat sur la plate-forme et en particulier à contester, preuves en main, les « portraits » qu’il a tracé de certains des protagonistes (Makhno, Archinov, Voline, etc.). Skirda n’a hélas ! pas lu attentivement le Libertaire de cette époque et certaines de ses affirmations prétendues fondées sur des textes parus dans le journal sont totalement contraires à la vérité ou à la simple matérialité des faits. C’est pourquoi je continue à considérer que tout ce qu’il a écrit sur ce sujet (dans son Makhno et dans son livre sur l’organisation intitulé Autonomie individuelle et force collective) est gravement entaché d’erreurs volontaires ou involontaires. En outre la tendance nettement hagiographique de sa biographie de Makhno en dit long sur son « objectivité » et gâte profondément son travail en lui enlevant une bonne part de sa crédibilité, ce qui est fort regrettable.

[11Voline, pour sa part, y mettra un point final, beaucoup plus tard, dans le Libertaire n° 463 du 6 septembre 1935, avec un article intitulé « Archinov répond à Archinov ».

[12 L’Encyclopédie anarchiste a été lancée en 1925 et publiée en fascicules (2 893 pages au total) jusqu’en décembre 1934. On remarquera toutefois qu’il ne s’agit là que de la première partie du projet initial beaucoup plus ambitieux. Il était prévu en effet (cf. la préface de L’Encyclopédie) quatre autres parties, à savoir une « Histoire de la pensée et de l’action anarchiste, pays par pays », une sorte de dictionnaire biographique des principaux militants ayant appartenu ou appartenant au mouvement, une bibliographie (livres, brochures, journaux, revues et publications de toutes sortes)... Il reste donc aujourd’hui encore assez de travail sur la planche pour occuper bon nombre de chercheurs !

[13Sous-titrée Cahiers mensuels d’études et d’action, cette revue n’était liée à aucune organisation et ne doit pas être confondue avec les précédentes portant le même titre. Elle a publié en tout 25 numéros, de décembre 1929 à avril-juin 1936, auxquels il faut ajouter un fascicule hors série daté de mai 1931 et un supplément intitulé « Choses d’Espagne » (19 août 1936), Voline y a publié notamment : « Lettres de Russie » (n° 2, janvier 1930) ; « En URSS, la vérité en marche » (n° 6, mai 1930) ; compte-rendu du livre de L. Trotski sur L’Internationale communiste après Lénine (n° 13/15, janv.-mars 1931) ; réponse à l’enquête sur « Anarchisme et franc-maçonnerie » (n° 16, juillet-sept. 1931) ; compte-rendu du livre de Herman Gorter Réponse à Lénine (n° 17, février 1932).

[14Cette collaboration n’est qu’occasionnelle car il précise dans une lettre à Hem Day datée du 21 juillet 1934 : (...) Je ne suis pas ami avec les camarades du Libertaire et pas très à l’aise avec ceux du Combat syndicaliste (copie in archives personnelles).

[15Ce bulletin ronéotypé était envoyé notamment à toutes les rédactions de journaux libertaires et servait en quelque sorte d’agence de presse. Il fut successivement publié à Berlin (1922-1933), à Haarlem (1933), à Madrid (1933-1935), à Paris (1936-1938) et enfin à Stockholm de janvier 1938 à juin 1940. Pour plus de précisions, cf. René Bianco, Un siècle de presse anarchiste d’expression française dans le monde, 1880-1983, thèse d’État Aix-en-Provence, 1988, 7 vol., 3 503 pp.

[16Pour ce dernier organe, en yiddish, il est sollicité fin 1934 par Mark Mratchny avec lequel il n’avait plus eu de contact depuis plusieurs années. Il lui répond dans une très longue lettre datée du 15 septembre 1934 qu’il fera son possible pour le satisfaire, mais qu’il lui est difficile de promettre une collaboration régulière car il est saturé d’occupations de toutes sortes (qu’il détaille à son correspondant).

[17Ce renseignement figure dans une lettre adressée par Voline à Hem Day, mais nous n’avons pu retrouver aucune trace de ce périodique.

[18On trouve dans ce numéro, outre les signatures de deux anarchistes belges : Hem Day (Marcel Dieu) et Ernestan (Ernest Tanrez), celles de Paul Dhermy et de Nestor Makhno. Le journal publie en outre la photo de Nicolas Rogdaieff et celle de A. Petrini.

[19Ce journal, qui paraissait déjà depuis plusieurs mois et avait pris la suite de l’Eveil social, a d’abord été publié à Aulnay-sous-Bois à partir de mai 1934 (n° 1). Il s’est très rapidement doté d’éditions régionales : trois au début, puis cinq à partir du n° 6, en octobre 1934, et dix, à partir du n° 9/10 de jany.-fév. 1935. Il eut également une édition en langue allemande : Freie Erde, diffusée à partir de Strasbourg. Il devint ensuite un organe libertaire mensuel puis, à partir du n° 28, année III, sept.-oct. 1936, l’organe de la FAF. Il est alors successivement imprimé à Paris (7 numéros), puis à Billancourt (7 numéros également), et enfin transféré à Nîmes à partir de septembre 1937. Après une suspension de six mois (fin 1938-début 1939), il reparaîtra à Paris de mars à juin-juillet 1939 (a. V, n° 65).

[20Ce périodique, dont le premier numéro, daté du 22 août 1936, paraît d’abord à Barcelone comme édition française de Solidaridad Obrera. Il est très rapidement transféré à Paris (à partir du n° 7, n.d., de septembre 1936) où il sera publié jusqu’au début de l’année suivante (dernier numéro : n° 31, 8 janvier 1938).

[21Créé pour combler la disparition de l’Espagne antifasciste, ce journal a d’abord paru sous la forme d’une série d’essais, ronéotés (de février à avril 1937), puis imprimés à partir du 19 avril 1937. Au début de 1938, deux autres organes se sabordent à son profit : le Semeur, publié en Normandie par A. Barbé, et l’Espagne antifasciste animée par les frères Lapera à Bordeaux. L’Espagne nouvelle porte alors en sous-titre : Organes réunis pour la défense des militants, des conquêtes et des principes de la Révolution sociale ibérique. C’est au printemps 1939 que le journal réduit légèrement son format, prend pour sous-titre : Organe de défense des militants, des conquêtes et des principes révolutionnaires en Espagne et alterne sa parution avec Terre libre. Le dernier numéro publié (a. III, n° 67/69, juillet-septembre 1939), paraît sous forme de revue (36 pp. et couverture) et porte le titre : « L’Espagne indomptée ».

[22Sa seconde compagne décède le 15 décembre 1939 à Aix-en-Provence.

[23Ce journal très intéressant a paru à Limoges de 1929 à 1939. Fondé à l’origine par des militants comme A. Perrissaguet, René Darsouze, Maurice Langlois, André Lansade, L. Chabaudie, etc., tous proches de S. Faure, il fut d’abord l’organe des fédéralistes anarchistes par opposition aux militants de l’Union anarchiste qui avaient alors adopté une position plutôt plate-formiste. Par la suite, ce journal deviendra un « organe anarchiste » (tout court), d’abord hebdomadaire (juin 1934), puis mensuel à partir d’octobre 1937. Ce qui fait surtout l’intérêt de ce titre, c’est qu’il était une tribune ouverte à toutes les tendances de l’anarchisme et qu’il donne en outre d’assez nombreuses informations sur les activités régionales au cours de cette période. Il faut regretter que personne jusqu’ici ne lui ait consacré une étude particulière. Le dernier numéro paru (n° 394) est daté de juillet 1939, mais le joumal n’a publié en fait que 388 numéros (pour les erreurs de numérotation et anomalies diverses se reporter à René Blanco, op. cit.).

[24Ce périodique, en langue italienne, qui a échappé à l’excellente bibliographie de L. Bettini, a pour titre exact : Bollettino interno. Comitato di Marsiglia - Gioventù libertaria italiana. On y trouve un article en français de Voline intitulé « Makhno et Lénine » dans son supplément au n° 9, du 3 août 1939 (pp. 12 à 14) et dans son n° 10, 25 août 1939 (suite et fin de l’article pp. 10 et 11).

[25Témoignage d’André Arru (cf. en particulier son article nécrologique paru dans le Libertaire n° 11 du 5 octobre 1945, article non signé car le journal appliquait alors la règle de l’anonymat et surtout son témoignage publié dans le Bulletin du CIRA n° 23/25, 1er semestre 1985, pp. 65-73).

[26La Raison n° 1, juin 1943. (Tiré au format 16,5x 25 cm, 12 pages.) Il n’y eut pas d’autre numéro car Arru fut arrêté le 3 août suivant et incarcéré. Cf. le Bulletin du CIRA n° 21/22, septembre 1984 (67 pp,), intitulé « Les anarchistes et la Résistance ».

[27Imprimés au format 11,5 x 15 cm (à cause de la rareté du papier), 16 pp., n° 1, février 1945 - n° 4 (et dernier), novembre 1945.

[28Voir à ce propos le récit rédigé en mars 1985, par Léo Eichenbaum-Voline et publié dans le Bulletin du CIRA n° 23/25, 1er sem. 1985 (pp. 169-174).

[29Cf. à ce propos le Libertaire du 5 octobre 1945, du 4 octobre 1946, du 23 octobre et du 6 novembre 1947. Cf. également l’Action syndicaliste n°6, de septembre 1945, Ce qu’il faut dire (de Louis Louvet) n° 12, 1945 (avec une photo), etc. De son côté, la revue anarchiste belge Pensée et action publia dans son n° 3, 20 novembre 1945, un texte signé Voline, intitulé « Dictature ou liberté » qui est en fait un extrait de la brochure paru sous le titre Le Fascisme rouge (voir pages 13 à 16 de ce fascicule), brochure qui constituait elle-même un développement de l’article que Voline avait donné en 1934 à Ce qu’il faut dire (cf. note 18).

[30Cf. par exemple le Monde libertaire n° 191, juin 1973 (avec photo), n° 217, décembre 1975, et n° 690, 14 janvier 1988 ; ainsi que le Réfractaire de May Picqueray, n° 74, juin juillet 1982.