Cette biographie sera simple, comme la vie de celui qui en est l’objet. Simple mais point banale et elle peut être une utile leçon de loyauté et de courage.
Yvetot, déjà plusieurs fois condamné et qui, à peine âgé d’une quarantaine d’années, possède un passé de militant, est né à Paris, dans la caserne des Minimes.
Il est le fils d’un gendarme. Son père, issu d’un brave gars de Normandie servit d’abord dans la garde impériale, puis, son temps fini, ne voulut pas revenir chez lui travailler la terre au profit des autres. Il refusa également de continuer des études commencées pour la prêtrise ; il se maria, entra dans la gendarmerie et devint bientôt le père de deux enfants : une fille qui mourut dans un couvent en 1887 et un garçon qui devait devenir un terrible révolutionnaire.
Georges Yvetot a donc grandi dans un milieu clérical et militariste. A la vérité, son père n’était pas un gendarme sans pitié, à cheval sur les principes ; il était plutôt remarquable par son manque de zèle. A sept ans, Yvetot perdit sa mère. A douze ans, il perdit son père qui mourut le jour même où il devait prendre sa retraite. L’orphelin se trouva en face d’une belle-mère (son père s’était remarié) qui ne demandait qu’à se débarrasser de lui. Déjà il avait été renvoyé de l’école des frères où on l’avait placé, à cause de son insupportable conduite. C’était un batailleur, un rouspéteur dont on voulait faire un enfant de troupe et qui aurait pu devenir un militaire. On se contenta de le placer à Auteuil, à l’orphelinat de l’abbé Roussel où il payait lui-même sa pension avec la retraite de son père.
C’est là que le jeune Yvetot apprit, de 1880 à 1887, le métier de typo. Il a gardé un excellent souvenir de son passage à l’Orphelinat d’Auteuil et, volontiers, il déclare que les Jésuites qui le gardaient enfant ne sont pas sensiblement différents des Jésuites de toutes nuances qu’il a connus, homme.