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Après les bombes de Ravachol, de Vaillant, d’Emile Henry, la bourgeoisie affolée se livra à une répression sauvage. Les anarchistes furent traqués comme des bêtes fauves. On ne voulut pas distinguer entre les théoriciens et les propagandistes par le fait. Il faut lire les journaux de l’époque pour se rendre compte de la rage et de la terreur qui sévissaient dans les milieux bourgeois.
La chasse fut ouverte. Le dimanche 28 février tous les commissaires de police de Paris et de banlieue furent convoqués. Ils reçurent des instructions et pleins pouvoirs pour agir. Dès le lendemain, les policiers commençaient leur travail. Avant le jour, ils s’introduisaient dans les maisons, enfonçaient les portes, mettaient au pillage les bahuts, les armoires, tous les meubles ; brutalisaient les femmes, les enfants ; injuriaient les hommes, emportaient tout ce qui leur tombait sous la main. Cette chasse dura près d’un mois et s’étendit à la France et même aux colonies. (Il y eut des arrestations en Algérie.)
Les prisons de Lyon, Saint-Etienne, Grenoble, Roanne, Marseille, Nîmes, Toulon, Montpellier, Cette, Toulouse, Bordeaux, Nancy, Brest, Nantes, Lille, Troyes, Dijon, etc., etc., s’emplirent de détenus.
En province comme à Paris, la population fut terrorisée. On n’osait plus ouvrir la bouche, lire un journal, recevoir un ami, correspondre avec un camarade. Les lettres étaient violées, de minutieuses enquêtes se poursuivaient, les ouvriers étaient traqués et en butte à toutes les tracasseries. On n’entendait parler que de prisons, de bagnes, de déportations.
En même temps, la folie de la peur s’empara du peuple. Ce fut une épidémie de lettres anonymes, une avalanche de dénonciations, un assaut de visites chez les juges et les policiers. Par sa lâcheté, par sa trahison, la foule semblait souscrire à la condamnation qu’avait prononcée et exécutée Emile Henry.