Accueil > PARTAGE NOIR - Brochures > Argentine > La F.O.R.A. > FORA - La Patagonie rebelle

FORA - La Patagonie rebelle

vendredi 7 juin 2019, par Alex Matin (CC by-nc-sa)

Entre temps, des luttes importantes avaient lieu. L’année 1921 fut très sanglante. En avril et en mai, les ouvriers récemment syndiqués des usines de traitement de Quebracho à la Forestal, dans le Chaco soutiennent la grève pour améliorer leur condition de vie presque animale. La police, à la solde des exploiteurs, puis l’armée, se chargent de réprimer violemment le mouvement, tuant une vingtaine d’ouvriers. A Gualeguaychu (Entre-Rios), le 1er Mai, plusieurs travailleurs sont tués par les bandes de la Ligue patriotique.

C’est aussi pendant cette même période que se dérouleront les événements qui, plus tard, entreront dans l’histoire du mouvement ouvrier international sous le nom de la Patagonie tragique, événements qui verront toute la Patagonie australe entrer en état de rébellion totale. La grève qui commença d’abord parmi les salariés de Rio Gallegos, petite capitale régionale, s’étendit comme une tache d’huile chez les « peones », ces misérables travailleurs agricoles des grandes haciendas (spécialisées dans la laine et la viande de mouton) dans toute la région, sous l’impulsion de la Sociedad Obrera de Rio Gallegos et de son principal dirigeant, l’anarchiste Antonio Soto. Le gouvernement, craignant de perdre la Patagonie où il n’existait pas encore d’administration stable, mais surtout pour protéger les intérêts des propriétaires fonciers et des capitalistes anglais (qui possédaient les frigorifiques) dépêche un corps expéditionnaire commandé par le général Varela, chargé de réprimer violemment les grèves. Plus de 1 500 travailleurs furent massacrés, fusillés, souvent torturés, par l’armée après avoir été faits prisonniers. S’il n’y eut aucune réaction de soutien, ce fut parce que toute l’affaire fut étouffée. Les délégués envoyés par la FORA « quintiste » sur place furent immédiatement fusillés, alors que la FORA « syndicaliste » collabora avec le gouvernement.

Ironie du sort, ce fut sous Irigoyen, radical, premier président a être élu au suffrage universel (1916) et qui supprima la peine de mort, que furent réprimés les mouvements de la Semana Tragica et de la Patagonie tragique.

Le général Varela sera assassiné en janvier 1923 par un anarchiste non violent, K. Wilckens, qui pensa ainsi venger les travailleurs morts dans le Grand Sud.