Donc, le mouvement syndical argentin est toujours divisé, mais paradoxalement on assiste en 1907 à une recrudescence des luttes qui atteignent une ampleur et une intensité encore inconnues en Argentine (selon le ministre du Travail, 170 000 ouvriers furent impliqués dans des grèves à Buenos-Aires, chiffre qui ne sera pas dépassé ni atteint avant 1919). Cette année connaîtra en effet de nombreuses grèves (la plupart du temps pour des augmentations de salaire et pour la journée de 8 heures) ainsi que deux grèves générales. La première, qui toucha plus de 150 000 travailleurs, fut déclarée par la FORA et l’UGT en janvier pour appuyer la fédération locale de Rosario et tout particulièrement les conducteurs de véhicules de cette même ville. L’autre fut déclarée pour protester contre les tragiques événements de Bahia Blanca où, lors d’une assemblée tenue par des riveurs grévistes, l’armée ouvrit le feu faisant 6 morts et 24 blessés.
Pour clore cette chaude année, la FORA tient son VIIe congrès du 15 au 19 décembre, 28 syndicats et 3 fédérations locales y assistent. Une motion rejetant toute tentative de fusion avec l’UGT est approuvée. La FORA ratifie aussi son caractère idéologique en envoyant un salut au Congrès internationale anarchiste d’Amsterdam. D’autre part, on planifie une grève générale pour le 13 janvier 1908 pour demander l’abrogation de la « Loi de résidence », de nombreux immigrés ayant été expulsés au cours du 2e semestre 1907 en vertu de cette loi.
La grève générale, très peu suivie est un échec pour la FORA. Les années 1908 et 1909 se caractériseront d’ailleurs par une nette retombée de l’action. Nonobstant, le mouvement ouvrier connaîtra un soubresaut en mai 1909, pendant la « Semaine rouge ». Le 1er Mai 1909, la manifestation de la FORA est subitement dissoute par la police qui tire sur la foule à bout portant ; on dénombre 8 morts et plus de 100 blessés. Une grève générale de protestation est proclamée conjointement par la FORA et l’UGT à partir du 3 mai. Plus de 250 000 travailleurs sont en grève. Mais la répression continue : plusieurs ouvriers sont blessés, voire tués lors d’attaques policières ; les centres et les locaux ouvriers sont fermés, au moins 2 000 militants sont emprisonnés ou déportés. Finalement, la grève cesse le 9 mai lorsque le gouvernement accepte de rouvrir les locaux et de libérer les militants emprisonnés.