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Augustin Souchy 1 - Attention : anarchiste ! [07]

jeudi 28 novembre 2019, par Augustin Souchy (CC by-nc-sa)

Au congrès de l’Internationale socialiste de 1907, à Stuttgart, il fut discuté à l’initiative de l’antimilitariste français Gustave Hervé des actions pacifistes que pouvaient adopter les socialistes, en particulier une grève générale contre la guerre. Les sociaux-démocrates allemands y étaient opposés, car pour eux une grève générale n’était rien d’autre qu’un « non-sens général ». Dans les milieux marxistes allemands, on argumentait de manière dogmatique : la guerre, que l’on concevait comme une conséquence du capitalisme, ne pouvait, pensait-on, disparaître que par l’instauration d’une société socialiste. Contre une attaque extérieure, particulièrement venant de Russie, politiquement arriérée et économiquement sous-développée, les sociaux-démocrates défendraient leur patrie. Avec cette argumentation naquit le social-patriotisme. Pour les partis « nationaux », c’était : l’Allemagne sauvera le monde. Mais les sociaux-patriotes étaient, eux aussi, plus proches de l’uniforme militaire que de l’écharpe rouge des socialistes internationalistes. Un projet de résolution qui exhortait les travailleurs à l’action directe contre la guerre et appelait les députés à voter contre les déclarations de guerre et les crédits fut rejeté, suite au veto des sociaux-démocrates allemands. Hervé, désappointé, se résigna et devint plus tard nationaliste. Les seuls sociaux-démocrates connus qui se déclarèrent pour l’action pacifiste furent Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht.

Au congrès international socialiste de Copenhague en 1910, le même jeu se répéta. Cette fois, c’était l’Anglais Keir Hardie qui, au nom de son parti, appelait les socialistes de tous les pays à lutter ensemble contre la guerre et le militarisme. Il exigeait non seulement le désarmement mais aussi la disparition totale de l’esprit militariste. Dans un projet de résolution présenté par lui-même et le Français Vaillant, la grève générale dans les industries d’armement et dans les transports était présentée comme le moyen le plus efficace contre la guerre, en plus d’une campagne internationale pour la paix. Cette fois encore, ce furent les sociaux-démocrates allemands qui refusèrent la proposition, alors que les sociaux-démocrates suédois eux-mêmes la regardaient de manière positive. Pour éviter une scission de l’internationale, on renonça au vote. Ainsi, les sociaux-démocraties allemands étaient-ils les principaux opposants à une stratégie antimilitariste conséquente. Bebel se contenta de critiquer au Reichstag les boutons brillants des uniformes que l’ennemi pouvait prendre pour cible. Il affirma que lui-même porterait les armes, malgré son grand âge, si c’était contre la Russie tsariste.