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FORA/UGT union dans l’action ou fusion

samedi 1er juin 2019, par Alex Matin (CC by-nc-sa)

La fin de l’année 1905 sera marquée par un nouvel état de siège. Le 18 septembre, les dockers de Rosario se mettent en grève et le mouvement s’étend à tous les ports argentins ; début octobre, les matelots de Buenos-Aires entrent dans la lutte. En même temps, les cheminots de Rosario menacent de se mettre en grève. C’en est trop pour les classes dominantes : l’état de siège est décrété. Emprisonnements et déportations, interdiction de la presse ouvrière... sont de nouveau à l’ordre du jour. A l’appel de la FORA et de l’UGT, une grève générale très suivie a lieu les 10 et 11 octobre, mais elle n’empêchera pas l’écroulement des luttes en cours. Pourtant, à peine l’état de siège terminé (janvier 1906), de nouvelles grèves très intenses éclatent et malgré l’utilisation massive du lock-out, elles se terminent presque toutes par des victoires. En effet 1906, et surtout 1907, seront des années de grande agitation ouvrière.

Du 19 au 23 septembre 1906 se tient le VIe congrès de la FORA. Seulement 55 des 105 organisations la composant y participent. Des discussions sur la grève générale (que certains délégués considèrent inefficace), sur les moyens de s’opposer au lock-out, sur les accidents de travail et sur l’éducation ouvrière ont lieu. La FORA se prononce encore une fois contre les coopératives (alors que l’UGT est pour). Mais le fait marquant du VIe congrès est la proposition de faire un congrès en vue d’unir en un seul organisme fédéral toutes les institutions ouvrières du pays.

L’UGT, lors de son IVe et dernier congrès (décembre 1906) accueille très favorablement l’idée d’un congrès d’unification, ainsi que plusieurs syndicats autonomes. Pourtant quelques voix, presque toutes extra-syndicales, s’élèvent contre l’unification, dont celle du principal journal anarchiste. La Protesta pour qui une telle union impliquerait, l’abdication des idéaux.

Le congrès d’unification a lieu le 28 mars 1907. Plus de 200 délégués (la majorité d’entre eux sont anarchistes) représentant quelques 150 syndicats y assistent. Le pacte de la FORA est pris comme base de discussion. Les débats sont riches et virulents. Pourtant le congrès va échouer lorsque par 62 voix, 9 contre et 38 abstentions est votée une motion disant que le congrès recommande la propagande du communisme anarchiste au sein de toutes les sociétés, ainsi que la discussion de toutes les idées. Les délégués des syndicats UGT et de nombreux autonomes se retirent du congrès.

De nombreux anarchistes ont critiqué la position de leurs compagnons qui ont empêché l’unité. Ainsi, Luigi Fabbri critique cette action qui a détruit la solidarité ouvrière en la qualifiant d’anti-libertaire et d’autoritaire, un acte de violence morale de la majorité sur la minorité. Mais pour la plupart des anarchistes présents au congrès, il n’en était pas ainsi. Selon eux (et ces arguments seront mis en avant lors des futures tentatives de fusion), le syndicat a sa finalité propre en se prononçant contre l’oppression et l’exploitation qui existent. Pourquoi ceux qui acceptent la phrase du pacte disant qu’ils recherchent l’émancipation intégrale refusent une définition catégorique qui explique en quoi consiste cette émancipation pour laquelle ils luttent ? La recommandation du communisme anarchiste n’est pas une imposition. D’abord, parce que chaque société peut l’appliquer ou non en fonction de ses intérêts, mais aussi parce que dans ces cas-là, il y aurait aussi une imposition lorsque se dégagent des majorités en faveur de la grève générale, etc. De plus, selon eux, unité n’était pas synonyme de fusion : il leur était préférable d’avoir une unité dans l’action qu’une unique organisation neutre, les moyens de lutte étant indissociables de l’organisation. Mais alors pourquoi avoir appelé à un congrès d’unification ?